

"Va en paix!"
"La discrétion :un surcroit de liberté"
"La discrétion :un surcroit de liberté"
"Devant le caractère sacré de la vie et des hommes eux‐mêmes,
une des plus grandes exigences dans les relations humaines est bien la discrétion,
une qualité d’effacement, de respect et d’humilité en présence du grand inconnu
qu’est une autre personne devant soi.
La discrétion trouve son enracinement dans l’Evangile.
Jésus témoigne de précautions exemplaires dans ses rencontres.
Il n’y a jamais de présentation exhaustive des personnes,
ni de questionnaire complet sur leur vie,
ni de fiche sur leurs moeurs.
Qui peut prétendre connaître quelqu’un et tout savoir sur lui ?
Seul l’amour est connaissance
et il n’a pas besoin de savoir quoi que ce soit sur un autre.
Pour imiter le Christ, nous sommes conviés à lâcher les réflexes du monde
pour apprendre et inventer d’autres formes de partage et d’échange de la parole et de l’amitié.
Nous sommes invités à respecter l’impénétrable de chaque être,
qu’il soit croisé pour un moment ou qu’il vive avec nous. "
"La discrétion, à l’imitation d’autres valeurs évangéliques,
comme la pauvreté ou la justice,
ne doit pas être regardée comme une contrainte ou un renoncement,
ni définie négativement comme une restriction,
mais au contraire,
lue et vécue comme une grâce de charité et un surcroît de liberté.
Une personne ne se définit pas par ce qu’elle a fait,
elle ne se réduit pas à ses actes.
J’évite de poser des questions
parce qu’un interrogatoire est toujours embarrassant, déplacé,
et il n’apporte rien à ce que nous vivons pour l’heure.
L’autre compte pour moi mais pas les détails de sa vie,
l’intérêt que je lui porte est plus profond et je m’accorde au présent que nous partageons.
Une personne ne se résume pas à ses malheurs
et la complaisance dans sa propre misère ou celle de l’autre n’aide pas à en sortir.
Se répandre sur sa médiocrité ou ses détresses peut servir à enchaîner celui qui écoute,
l’obliger à avoir pitié, le lier à soi.
Se vanter comme se déprécier peuvent être des pièges pour s’attacher quelqu’un.
Je veux accueillir l’autre tel qu’il est sans rien savoir de lui
parce que savoir peut toujours devenir une forme de pouvoir."

Le Seigneur m’a dégagé, mis au large, il m’a libéré, car il m’aime. Psaume 17, 20.
un art de vivre amitié et fraternité
un art de vivre amitié et fraternité
"La discrétion ne doit jamais être transgressée,
elle n’est pas une formation crispée à la cachotterie infantile ou au secret
mais un art de vivre amitié et fraternité.
Je façonne mon esprit à la retenue et j’éduque ma langue à la réserve.
Être discret, c’est avant tout vouloir aimer l’autre tel qu’il est, ne rien réclamer de lui, juste être là pour lui
sans le questionner sur son histoire ni l’envahir par des confidences personnelles.
Être discret, c’est préserver l’autre, le protéger, prendre soin de lui en sauvegardant son inconnu.
La discrétion exige une grande pudeur, de parole, de geste et d’expression des sentiments.
Elle peut user de moyens simples pour soigner, soulager et relever,
elle préfère le baume du silence, la douceur de l’attention, la confiance dans ce qui advient.
Elle réclame de se taire, elle consiste aussi à ne pas raconter à tous ce que l’on connaît d’un autre.
L’indiscrétion se situe toujours dans l’abus et le pouvoir,
c’est forcer l’autre à se dire, le contraindre à se confier même sous prétexte d’intérêt ou d’amitié ou de fraternité.
Elle est toujours une violence, proche du viol.
C’est peut‐ être ce que Jésus veut signifier en disant :
« Ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré ;
ne jetez pas vos perles aux pourceaux,
de peur qu’ils ne les piétinent, puis se retournent pour vous déchirer. »
Le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal
auquel Adam et Êve ont touché par un abus est l’abus lui‐même.
Prétendre connaître le bien et le mal, savoir le bien pour quelqu’un
conduit à lui imposer, prendre pouvoir sur lui, profaner sa conscience personnelle et ruiner son libre arbitre.
La consommation du fruit révèle à Adam qu’il est nu, désormais n’importe qui peut mettre la main sur lui,
le contraindre, savoir à sa place, l’outrager et enfreindre sa liberté,
puis justifier sa profanation par la déclaration tonitruante que c’est pour son bien.
Alors Dieu, pour atténuer cette violence, va coudre un vêtement de peau
afin de protéger l’homme et la femme l’un de l’autre.
Nul ne peut se permettre de toucher à l’intime de quelqu’un d’autre.
Face à une personne avec ses blessures cachées devant soi,
nul n’est autorisé à explorer une plaie,
appuyer sur un hématome ou arracher un pansement. "
fr Jean Pierre Brice Olivier o.p